A L’ASSAUT DES SOMMETS EN ROYAL ENFIELD TÉMOIGNAGE D’ANNE ET PIERRE

D’un continent à l’autre, de l’Inde à l’Amérique du sud, nous avons décidé de les suivre. Eux, Chloé, Gauthier et leurs Royal Enfield. Nous, Anne et Pierre, motards épris de liberté et d’indépendance. Eux qui ont vadrouillé dans le monde, apprivoisé l’Argentine, trouvé deux Royal Enfield et appris l’espagnol. Nous, qui avons échangé avec eux, travaillé de concert, raturé, griffonné nos cartes et peaufiné notre projet des mois durant …

Equateur, le pays des 4 saisons, alors quand partir ?

Depuis le temps que l’on rêvait de rouler sur les pistes argentines … Nous avons enfin débarqué le 06/10/2012 à Salta, petite ville du nord ouest argentin, point de départ idéal pour vadrouiller dans la région quand on a soif d’aventure …

La belle Royal Enfield Classic EFI 500 se laisse admirer avant de se laisser enfourcher pour un voyage hors du commun … Dès le premier jour de roulage nous en prenons plein la vue. Il faut spécifier qu’avec la Bullet la vitesse de pointe en duo frise les 120 kms/h !!!

Le site archéologique et labyrinthique de Quilmès nous ramène quelques centaines d’années en arrière au temps de la splendeur de la civilisation Inca. A l’assaut du Nirvana, la mythique route 40 s’offre à nos roues dévoreuses de sable, de terre et d’asphalte.

Ruines de Quilmès

DE LA JUNGLE AU DÉSERT

Campo los alisos – Voyage moto Argentine

Le lendemain, changement de décor, nous nous enfonçons dans la jungle du parc national Campo de los Alisos puis sur les premières hauteurs et pistes piégeuses pour traverser la sierra Aconquilla.

La route serpente, descend vers Andalgala, sortie des nuages, virages en lacets, prise de photos… nous longeons le salar de Pipacano il n’y a plus ni ouïe, ni vue, ni odorat, ni toucher, plus aucun sens à part les intenses vibrations omniprésentes du gros monocylindre… nous croisons quelques gauchos à cheval, dépassons les petites chapelles dédiées à leur protection spirituelle, apercevons des chevaux sauvages.

Salar de Pipacano

OBJECTIF LUNE

Sitôt levés, nous nous promenons, seuls, dans les ruines millénaires de Shincal, Catamarca. Enfin un peu d’exercice physique pour gravir les marches menant aux promontoires, sépultures et temples. On approche des 4000m d’altitude.

Les Royal Enfield sont de nouveau mises à contribution, des « empanadas » sont les bienvenues à l’heure du déjeuner, à chaque étape, l’accueil est convivial et chaleureux, nos guides sachant, à chaque instant, mettre tout le monde à l’aise …
Les paysages défilent, nous traversons la chaîne de montagne « sierra de Sanogasta » par la magnifique« cuesta de Miranda » sur une piste taillée dans la pierre rouge. Le panorama est à couper le souffle !!!

Objectif lune, donc, pour la visite du parc d’Ischigualasto (nom qui signifie terre sans vie) classé au patrimoine mondial de lUnesco
De retour de la lune, nous retraversons la Cuesta de Miranda, puis quelques villages perdus dans la vallée pour rejoindre Tinogasta d’où l’on aperçoit les plus hautes dunes du monde.

LA TÊTE ROSE DE L’INCA

Menu du lendemain : montée en altitude immédiate avec 140 kms de piste au programme. Vers midi nous prenons un chemin de traverse. Après une pente plutôt scabreuse montée en solo, nous découvrons les Minas Capillitas, mines de la pierre rouge nommée « rodocrosite » que nous retrouverons dans les boutiques souvenir de Buenos Aires.

Enfin Cafayate est atteinte. Bien installés sur la terrasse, nous entamons notre court séjour par la dégustation d’un Torrontès, vin blanc sec très agréable. Il est bon de prendre son temps dans un hôtel luxueux, avec fontaine dans le patio intérieur et piscine surplombant les vignes.

Après un copieux petit déjeuner on s’élance et on trace à quelques 80 kms/heure. Nous passons par des villages complètement isolés, des écoles en pleine nature, des églises nappées de chaux, des cimetières fleuris. Au passage d’un col nous nous arrêtons pour admirer le paysage sublime. L’endroit est empreint d’une grande sérénité.

Quelques kilomètres plus loin nous entrons dans le parc national Los Cardones, champ gigantesque de candélabres épineux, que nous traversons sur la fameuse Recta Tin Tin, ligne droite de 18 kms située à 3000 m d’altitude, petite partie de l’ancien chemin de l’Inca, long de 5200 kms.

Cachi, toute de blanc vêtue, ne veut pas nous laisser la quitter. Au petit matin, déambulant dans les rues en pavés, les maisons en pisé, les places isolées, nous gagnons un peu de temps sur le temps en le suspendant dans ce charmant village dominé par de majestueuses montagnes.

Cachi et ses montagnes

IRUYA LA SOLITAIRE

Changement de décor. Nous ondulons maintenant dans une forêt verdoyante pour arriver rapidement à Jujuy, prononcer Rrrrourrrrouoye… et entamer le passage de laQuebrada de Humahuaca classée au patrimoine mondial de l’Unesco.

Dans ces régions la musique revêt une grande importance. Des instruments sont en exposition un peu partout, des indiens jouent sur les marchés, d’autres animent les restaurants peuplés de clients qui viennent pour dîner, mais, surtout, pour les écouter.

Il nous reste cinquante kilomètres à parcourir avant la nuit. Qu’à cela ne tienne, Chloé nous entraîne dans un jump à quatre sur fond de ciel bleu… quand Iruya nous apparaît, petit village perché à flan de montagne, isolé de tout, petit bout du monde pittoresque comme nous les aimons.

Les condors sont des lève-tôt et, dès l’aube, nous sommes au balcon pour voir leurs ailes déployées sur plus de trois mètres prendre les courants d’air chauds ascendants, gagner les sommets pour, ensuite, se laisser glisser paresseusement dans la vallée et chasser le gibier.

Iruya, lovée dans la montagne

LAGUNA ET SALINAS

Les vigognes continuent de nous narguer, les lamas paissent tranquilles le long d’une voie de chemin de fer désaffectée, nous collons à la roue de Gauthier qui se repère au GPS pour nous guider parmi un dédale de pistes et arriver ainsi à Yavi
Romantique avec ses maisons en pisé, elle abrite l’église la plus remarquable de tout le nord argentin. Nous ne sommes qu’à quelques kilomètres de la Bolivie.

A la sortie de la ville un panneau nous indique qu’Ushuaia est à 5121 kms. Nous sommes au tout début (ou à la fin) de la fameuse route 40.

Nous traversons des villages qui ressemblent tous à ceux des westerns de notre jeunesse faits de terre,  de sable, de désert, de poussière, de cactus, de chevaux, de masures en terre cuite, de vieilles caisses américaines rouillées.

Soudain la Laguna de los Pozuelos, vaste étendue d’eau salée, nous barre la route. Nous stoppons pour mettre notre nappe bariolée sur une table providentielle. A 4000 mètres d’altitude, avec l’unique compagnie des 40 espèces d’oiseaux plus ou moins exotiques : je prends la posture du chasseur de photos, je m’approche lentement, doucement, précautionneusement, pas à pas … Raté, le flamant rose, qui me guettait, prend son élan et s’envole.

Pour le dîner le choix se fait à l’unanimité, ce sera un petit restaurant très local où viendront jouer et chanter une famille des environs.

Aujourd’hui il s’agit  de rejoindre San Antonio de los Cobres.

Surprise, à la sortie du dernier virage, une longue ligne droite aboutit à une immensité immaculée, l’océan de sel des Salinas Grandes, plaine saline située dans une partie reculée de la Puna, à 3350 m au-dessus de la mer !!! La route traverse l’étendue salée.

Nous nous éloignons de la route par ce qui ressemble à une piste cotonneuse et craquelée, truffée de trous qu’il faut soigneusement éviter … Impressionnant !

Nous arrivons à San Antonio de los Cobres, petite bourgade minière poussiéreuse. De joie nous nous tapons dans les mains, il est tard. Ce moment de joie intense, à la veille de retrouver Salta, épuisés par 4000 kilomètres dont 1800 de piste, 16 jours de moto, des vents violents sur le visage, des milliards de grains de sable sous le casque, des rêves réalisés pleins la tête, éblouis par une multitude de paysages colorés, tous différents, uniques, nous nous disons qu’on a bien fait de venir, qu’on a bien vécu, bien roulé, nous nous disons que nos hôtes nous ont mitonné une aventure hors du commun, et que nous allons pouvoir trinquer à l’amitié.

 

RETOUR SUR TERRE...

Nous sommes toujours perchés au cœur des Andes à 3800 m d’altitude, entourés de sommets enneigés et pas pressés de redescendre de l’Altiplano.

A faible allure, pour profiter au maximum de notre dernière Quebrada (nommée del Toro), nous enchaînons paisiblement les virages au sein de ce site grandiose. Pour une fois nous ne faisons pas de pause photo. Le spectacle est pour les yeux et nos sens en éveil. L’atterrissage dans un autre monde sera pour plus tard …

Les motos sont au garage pour un lavage bien mérité. L’avion nous emmènera ensuite à Punta del Este en Uruguay. Nous ne souhaitons pas rentrer d’un voyage comme celui-ci d’un seul coup d’aile mais préférons atterrir plus en douceur par quelques sauts de puce.

Derrière le label « Mono 500 » se cachent Chloé et Gauthier et leurs rêves les plus fous. 

Ils ont réussi à dénicher, dans un pays aussi fermé que l’Argentine, deux motos indiennes, deux Royal Enfield et ce, pour notre plus grand plaisir. Ces motos, très faciles de prise en main, au look rétro, ne se contentent donc pas de voyager à travers le temps (elles ont été créées en 1901) mais aussi à travers les continents. Elles font partie de l’identité « rétro » de leurs circuits et participent activement à l’art de vivre le voyage dans des coins reculés et peu fréquentés par le tourisme de masse.

Nous leur souhaitons bonne route pour faire découvrir à beaucoup d’autres motards passionnés les magnifiques paysages de la Cordillère des Andes …

Anne et Pierre P.

 

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