PORTRAITS

Toute l’année, nous suivons des voyageurs au long cours. Nous en rencontrons certains en voyage, d’autres chez nous. Et c’est toujours l’occasion de partager nos découvertes et notre passion pour le voyage et l’aventure.

Thibault Bourdon: une exploration à moto de la Russie aux Etats-Unis !

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Passionné de géopolitique et de voyages, Thibault explore le monde pour rencontrer, interviewer, filmer et réaliser des documentaires sur nos identités multiples: Français, Européens, Russes, Américains…

Pour son dernier film, il a parcouru plus de 20 000 km à moto, seul, de Moscou à Washington. Une véritable odyssée, pendant laquelle il donne la parole aux citoyens russes et américains pour comprendre l’origine de leurs deux visions du monde. Récit d’une exploration pleine de sens. 

Affiche du film de Thibaul Bourdon

Comment est née ton idée de voyage Russie / Etats-Unis ?

Avant même de vouloir réaliser un documentaire sur la Guerre froide, l’envie de voyager en Russie me trottait en tête depuis quelques années.

Le faire en train ? Trop facile ! A vélo ? Trop long ! La moto fut le bon compromis pour voyager dans le temps à travers cet axe de vie russe qu’est la transsibérienne, de Moscou à Vladivostok !

Puis, tant qu’à apprendre un peu le russe, il était aussi intéressant de voir son ennemi de la Guerre froide : les États-Unis ! Il faut dire que le désir de découvrir ce pays était beaucoup moins intense. En France, on grandit sous le dictat de la culture américaine. 

Mais après tout, essayer de comprendre si la vie des Américains étaient vraiment comme dans les films a pu me permettre de tirer le vrai du faux. Là où en Russie, j’étais dans la découverte totale !

“…en Russie, j’étais dans la découverte totale !”

Comment as-tu préparé ton voyage à moto ?

J’ai tout d’abord passé le permis A2, car quand m’est venue l’idée de cette odyssée je n’étais jamais monté sur une moto. Permis en poche en quelques semaines, j’ai acheté une YBR125 Custom. C’était clairement pas une moto adaptée à ce périple, mais elle me plaisait bien. 

Je suis parti sous la tempête de Cherbourg jusqu’à Bilbao pour l’essayer. Un petit aller-retour de deux semaines pour ma première expérience deux roues et tester mon matos. J’ai appris que le cuir ne résiste pas plus d’une demi-heure aux averses normandes. De quoi se préparer pour la Sibérie ! 

Puis je suis parti vivre 3 mois à Saint-Pétersbourg apprendre les rudiments du russe à l’université. Comme je suis parti dans le but de tourner un documentaire, il me fallait de quoi être compris et de faciliter les rencontres. Dans tous les cas, je n’aime pas voyager si je ne possède pas les clefs pour observer, comprendre et interagir avec les habitants. Et cela commence par la langue ! 

Pour l’administratif ce fut beaucoup de recherches sur les forums anglais (comment passer les frontières, les visas, le fret de véhicule, les assurances…). Et pour appréhender les routes sibériennes, j’avais aussi contacté Laurent Cochet qui avait déjà traversé la Russie. C’est tellement cocasse quand je pense que 2 ans après, je me suis retrouvé à être formé au Off-road par notre Lolo national !

Yahama custom Thibaul Bourdon

Quel était ton itinéraire ?

J’aime cette sensation de quitter sa maison et de se dire que l’on n’y reviendra que quand on aura fini son tour du monde !

J’ai donc simplement commencé mon odyssée à Cherbourg, en Normandie. Et comme le début de mon documentaire se situe à Moscou, il m’a bien fallu m’y rendre !

J’ai traversé pendant un mois l’Europe. La France, la Belgique, l’Allemagne, la Pologne, la Lituanie, la Lettonie puis enfin l’Estonie avant d’arriver en Russie. En Russie, j’ai tenu à revenir à Saint-Pétersbourg ma ville de cœur pour y visiter des amis et m’emplir de nostalgie !

Puis Moscou, le commencement ! 10 000 km en Russie le long de la Transsibérienne, la plus grande ligne droite du monde au milieu de la Sibérie. Bercé par les levers et couchers de soleil, j’ai visité Kazan, Nijni Novgorod, Ekaterinbourg, Perm, Omsk, Irkoutsk, le Lac Baïkal, Oulan-Oude, Khabarovsk et finalement Vladivostok ! 

On a l’impression d’être très au nord de tout puisque qu’on passe au dessus du Kazakhstan, de la Mongolie, de la Chine et de la Corée du Nord entres autres…pourtant Vladivostok est à la même latitude que Nice ! 

J’ai vendu ma bécane à Vladivostok, puis j’ai pris un avion pour Seattle (Escale par la Chine, pas de direct Russie-Etats-Unis). Aux States, j’ai acheté une GZ250 d’occasion. 

Quelques jours après mon arrivée, j’ai roulé l’état de Washington, l’Orgeon, et toute la Californie. Là-bas, j’ai traversé la vallée de la Mort, Las Vegas et toute la mythique route 66 jusqu’à Chicago avant de terminer magistralement mon odyssée au pied du Capitole à Washigton DC !

Road trip moto Russie Thibault Bourdon

Pourquoi avoir voyagé à moto ? 

Je venais de vivre deux épopées à vélo ! En 2015, presque 10 000 km en Europe de l’Ouest et en 2016, 5 500 km en France ! Autant vous dire que mes mollets m’ont donné l’idée de la bécane ! 

Et quand j’ai eu mon permis, mon rêve était de partir avec une motobécane de 1953, l’année de la mort de Staline ! Mais bon, il faut être réaliste et une moto ancienne pour ce voyage ce n’était pas possible. Mes connaissances en mécaniques étaient nulles et les assurances capricieuses ! 

Je me suis donc rabattu sur une petite cylindrée, quelque chose semblable à un vélo, mais avec un moteur ! Le rouge de la Yamaha me rappelait la Guerre froide, sujet de mon documentaire en plus d’être ma couleur préférée ! 

Et je tiens à préciser que je n’ai pas choisi une 125 parce que je n’avais pas le permis… la formation 125cc n’est valide qu’en France ! J’aurai très bien pu partir avec une Africa twin. Mais montrer qu’on en a une grosse n’est pas nécessaire pour aller vers l’Autre. 

Le voyage à moto c’est beaucoup plus facile que le vélo, moins fatiguant que la marche, et surtout on peut emmener beaucoup de matériel. Et quand on tourne à film, je vous assure que ça change la donne ! 

Il faut seulement garder la tête sur les épaules et être conscient du danger que cela représente ! Ne jamais boire la veille de conduire, savoir se reposer, éviter la pluie quand c’est possible (surtout sous les cumulonimbus sibériens, je vous assure que ça fracasse) et anticiper ! 

Comme à pieds, ou à vélo, on reste dépendant des éléments. Et ça, ça me plait ! Voyager, c’est sortir de son cocon, se confronter au monde. C’est en subir la tempête, la chaleur du désert, le vent marin et son odeur iodée. Une moto n’offre pas de toit ! Un bon prétexte pour demander à camper dans le jardin des gens et faire connaissance. Une bonne dose de liberté en somme !

“Montrer qu’on en a une grosse n’est pas nécessaire pour aller vers l’Autre”

Thibault Bourdon à Moscou

Ce qui t’a le plus surpris ?

L’accueil, le contact avec les gens, leurs manières de vivre, leur rythme…ou tout autre chose !

Tes plus belles rencontres ? 

Toutes les personnes qui m’ont hébergé et qui se sont livrées à ma caméra ont bouleversé ma vision de ces deux pays. 

En Russie, Yuri, un journaliste à la retraite, a tout donné. Il en a eu les larmes aux yeux quand il me parlait de la Perestroïka et de la destruction de tout ce qu’il avait pu connaître dans sa vie. L’effondrement économique et idéologique de ce en quoi il croyait. De ses racines. De sa conception du monde. Et d’un avenir peu radieux. 

Aux États-Unis, PJ, un ancien photographe qui a vécu le rêve américain. Né d’une mère prostituée au Canada, il a pris sa voiture à 16 ans et est parti vivre à Los Angeles. Très vite célèbre dans le milieu, il tenait de nombreux rôles dans les films quand les productions avaient besoin d’un Amérindien. Il a était le visage des cigarettes Philippe Morris. A 24 ans, il a acheté une maison à Bel Air, le quartier le plus cher de LA. Il avait même une chambre dans laquelle il n’est jamais rentré. Puis il a photographié de nombreuses stars dont David Bowie.

Interview russe Moscou

Ta plus belle galère ? 

Je me voyais déjà à Vladivostok. Seulement 3 ou 4 jours à rouler et c’était bon, sauf que… Au milieu de ce passage entre Tchita et Khabarovsk, ce passage de 2100km (l’équivalent d’un Paris-Vilnius), là où il ne fallait pas tomber en panne… l’inévitable arriva ! Impossible de redémarrer avec l’allumage électrique. Heureusement, il me restait le kick ! 

Des pauses ? Seulement pour faire de l’essence, et en profiter pour manger un morceau au même moment ! Je ne savais jamais si j’allais pouvoir repartir. De nuit en pleine Sibérie, un éclairage inexistant, obligé de rouler la visière ouverte pour permettre à la lumière de la Lune de pénétrer mes pupilles (mon phare n’éclairait qu’à moitié). 

Les moustiques, eux, en profitaient pour venir me troubler la vue… C’est exténué, vidé, sur une autre planète, après avoir gardé les gaz à fond toute la journée que j’ai réussi à faire les 880km. De 8h du matin à 2h de l’autre matin que j’ai réussi à rejoindre la prochaine ville. 

Je vous avais dit que je n’y connaissais rien en mécanique…Et j’avais une pompe à injection, plutôt qu’un sacré carbu ! Finalement, j’y ai vendu la moto avant d’en racheter une aux États-Unis. Cela m’aura valu un passage au tribunal en Russie, mais ça c’est une autre histoire !

Road trip moto Russie

Ton meilleur souvenir ? 

Je vous ai raconté comment j’ai perdu ma première moto en Russie ? Pour les États-Unis, je buvais une bière dans le National Press Club à Washigton DC. J’y contais mon histoire et le sujet de mon documentaire entre Poutine et Trump, jusqu’à ce qu’une amie d’un ami m’a demandé combien je vendais ma moto avant de repartir en France ! 

Journaliste à The Epoch Times, elle n’avait aussi jamais roulé à moto ! Mais avait pour projet d’apprendre. Elle m’a donc acheté cette moto qui m’a servi à sonder le rêve américain et le point de vue politique des habitants sur Donald Trump. Le comble quand elle m’a dit qu’elle le photographiait souvent à la Maison Blanche…

Documentaire moto géopolitique Thibault Bourdon

Quel est l’objet que tu as emporté qui ne t’a jamais servi ? 

Ou plutôt quel est l’objet qui m’a le plus servi ? Ma cafetière ! Une Moka italienne que je trimballe depuis des années. Je l’ai achetée en Italie quand je traversais le pays à vélo ! Au petit matin, un bon café, c’est une bonne journée assurée !

Quel serait ton prochain road trip à moto ? 

L’Amérique du Sud… à bécane bien sur ! 6 mois, 30 000 km et un nouveau documentaire de géopolitique “Caliente” !

Pour découvrir les films de Thibault, rendez-vous sur son site www.thibaultbourdon.com et retrouvez ses actus sur Facebook et Instagram.

Trailer de “L’Odysée Est-Ouest”:

Par : Thibault Bourdon
Crédits photos et vidéo: Thibault Bourdon

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